Comment capter les médias ?
Petit Déj’ du 25 avril 2006, aux Ateliers Varans.
Intervenants :
- Joy Banerjee, journaliste à France 3, Laure Noualhat, journaliste à Libération
- Avec la participation de Pierre Ganz pour Radio France International
- et Luc Lagun-Bouchet pour France 3
Animateur : Vincent David
Face aux institutions, aux entreprises, aux politiques et aux syndicats, les ONG arrivent premières dans le cœur des Français quelque soit leur activité (sondage TMO[1] d’octobre 2005) : environnement et protection de la nature, santé et aide humanitaire, aide au développement et droits de l’homme.
Cependant, si les ONG jouissent d’une bonne image auprès de l’opinion publique, elles ont toujours besoin de l’appui des médias pour faire passer leurs messages et continuer à sensibiliser le public aux problématiques qui les préoccupent quotidiennement. Or force est de constater que leur actualité ne constitue pas celle des médias. En prenant en compte les contraintes, les besoins et les attentes de chacun, comment faire pour que les informations relatives à la solidarité internationale soient relayées et diffusées de manière régulière et objective ?
Comprendre le fonctionnement des médias
Principales sources d’information des médias pour traiter des sujets relatifs à la solidarité internationale :
- des correspondants à l’étranger qui relaient les informations concernant l’action des ONG
- les informations émanant directement des ONG sur le terrain
- les agences de presse, type AFP (Agence France Presse)
- l’abonnement à EVN (European VLBI Network), fournisseur d’images
- Internet
Pourquoi les médias parlent peu de la solidarité internationale ?
Logique médiatique et choix éditoriaux :
Les choix éditoriaux sont liés aux attentes du public (à l’audimat et aux ventes) qui se dit lassé par les sujets anxiogènes et misérabilistes. Même si paradoxalement, ce sont ces mêmes sujets difficiles, « chocs », qui sont traités en priorité par les médias.
Dans la logique médiatique, plus les sujets sont en liens avec l’actualité (crises humanitaires plutôt que projets de développement) et se rapprochent des préoccupations quotidiennes du public (phénomène d’identification, ex : Tsunami) plus l’information sera susceptible d’être reprise.
Restrictions budgétaires :
Les rédactions sont soumises à des restrictions budgétaires, qui les contraignent à minimiser le traitement coûteux de sujets lointains. Les sujets internationaux ou humanitaires sont pris en compte lorsque l’importance de l’événement justifie les frais de déplacement.
Ce manque de moyens pèse également sur la maîtrise du sujet traité : le travail d’investigation et d’analyse à fournir, pour bien mesurer les impacts et les conséquences d’une crise humanitaire ou d’un processus de développement, nécessite du temps dont ne disposent pas toujours les journalistes.
Choix du sujet traité :
Le journaliste choisit son sujet et le soumet lors de la conférence de rédaction, tenue de manière quotidienne ou hebdomadaire en fonction de la périodicité du média. La décision revient alors au rédacteur en chef qui statue en dernier sur la possibilité de traiter et diffuser ledit sujet.
Compétition entre les différents services au sein d’un même média :
La solidarité internationale est un thème transversal avec différentes entrées (thématiques, géographiques, etc.) susceptible d’être traitée par plusieurs services au sein d’un même média (social, monde, économie, informations générales, etc.). Or, il peut survenir que les services entre eux se retrouvent en compétition pour traiter d’un sujet donné.
Vers un partenariat ONG/Médias…
Ci-dessous, quelques pistes évoquées par les ONG et médias présents lors de la rencontre. Prémices de la mise en place d’un partenariat ONG/Médias dans la perspective de renforcer la visibilité des acteurs de la solidarité internationale et de leurs actions.
Développer des systèmes de co-financement
Mettre en place un système de co-financements, déjà employé par certaines ONG, pour pallier aux problèmes budgétaires que rencontrent les rédactions en ce qui concerne l’envoi de reporters sur le terrain. L’ONG prend alors en charge tout ou une partie des frais des journalistes : billet d’avion, hébergement, transport et encadrement sur place, etc. Mais se pose alors un vrai problème déontologique. Comment un journaliste peut-il être objectif sur la situation d’un pays ou sur l’action d’une ONG quand il est financé par elle même ? Qu’est-ce que l’ONG attend véritablement d’un journaliste quand elle agit de la sorte ? Une des solutions serait de mettre en place un véritable contrat de réciprocité respectant les objectifs, les intérêts et contraintes de chacun.
Créer un rendez-vous mensuel télévisé d’information
Il serait dédié à la solidarité internationale, présidé par un « comité stratégique éthique ». Les orientations de l’émission et les sujets abordés seraient alors choisis conjointement par des journalistes et par des personnalités du monde de la solidarité internationale (Proposition émanant de Joy Banerjee, journaliste à France 3).
Développer des partenariats avec des écoles de journalisme
Ces initiatives sont déjà utilisées par certaines ONG. Elles interviennent alors dans des modules de formation et proposent aux étudiants de travailler sur des thématiques de la solidarité internationale (Exemple DCC).
Identifier le bon interlocuteur au sein des médias
Se constituer un fichier presse avec les contacts des journalistes qui seront prêts à défendre le sujet que l’ONG souhaite médiatiser. Pour cela, identifier au sein des rédactions les journalistes qui travaillent sur la thématique en lien avec son activité et garder à l’esprit le turn-over des journalistes au sein des rédactions.
Pour aller plus loin dans la pratique des relations presse
Etre une source d’information fiable
- Via Internet : Aujourd’hui une des premières sources d’information pour les journalistes, Internet, offre pour les associations une formidable tribune de présentation de leurs activités.
- En tant qu’expert dans son domaine : L’envoi régulier d’informations (dossiers thématiques, rapports de positions, communiqué de presse) aux journalistes permet de créer un lien avec ces derniers. Cela leur permet d’identifier les ONG en tant que référent sur tel ou tel domaine et participe à leurs ressources documentaires. Pour cela, il ne faut pas espérer une reprise immédiate des informations dans les médias, c’est un travail de relations presse sur le long terme.
Utiliser les actions et activités de l’ONG pouvant être en lien avec l’actualité
Par exemple, une actualité sur la sécheresse est l’occasion d’évoquer les problématiques de réchauffement climatique.
Outils pratiques et formations
- MédiaSIG (répertoire des médias, MédiaSIG, la Documentation Française, 40 euros ou sur le site www.premier-ministre.gouv.fr) ou autre répertoire des relations presse (disponible en librairie). Ne pas hésiter à appeler les rédactions et demander le contact du journaliste qui est susceptible de traiter votre sujet.
- Formations média training pour les associations organisée par Tocsin, www.tocsin.net
Pour aller plus loin dans la réflexion
- www.actu-environnement.com/ae/news/print_news.php4 ?id=1361 LABY F., Actu Environnement, « Les ONG jouissent d’une grande notoriété auprès des français », publié le 10/11/2005
- http://edoctorale74.univlille2.fr/fileadmin/master_recherche/T_l_chargement/memoires/politique/rieunierg01.pdf
- RIEUNIER G., « Les associations de solidarité internationale face aux médias », Mémoire de DEA de Sciences Politiques, Institut d’Etudes Politiques – Université de Lille II, 2001
- www.iehei.org/bibliotheque/memoires/FERENCZY.pdf FERENCZY Z. A., « Les ONG humanitaires, leur financement et les médias », Mémoire de l’Institut Européen des Hautes Etudes Internationales, Nice, juin 2005
- www.aprad.org/forum_message_huma/FMH_ONG.html ONG et image, « Débat sur la récolte de fonds et l’éthique des images : l’évolution des stratégies de communication des ONG dans la production audiovisuelle »
- http://stephanie.dupont3.free.fr/index.htm Un site pratique sur les enjeux d’Internet dans la communication des associations humanitaires.